5 outils pour booster votre apprentissage

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L’économiste et professeur d’université Tyler Cowen est l’auteur du livre « Average Is Over » (en). À l’ère de la start-up nation, de la plus grande révolution technologique et industrielle que le monde ait connu, la moyenne est dépassée. Être moyen ne suffit plus, seule l’excellence compte.

Pour atteindre l’excellence, il n’y a que deux possibilités : être un tueur dans un domaine ou être suffisamment bon dans plusieurs domaines pour créer un profil unique. C’est le fameux profil T-Shape.

Le problème est que pour viser l’excellence, nous devons apprendre vite et bien. Apprendre à développer nos compétences, apprendre à apprendre, apprendre à gérer l’échec et surtout apprendre à poursuivre notre quête malgré les embûches.

Nous allons ainsi voir dans cet article une présentation rapide de la philosophie de l’apprentissage, de même que les méthodes et techniques permettant de développer efficacement une ou plusieurs compétences.

Embrasser la difficulté

Sans difficulté, il ne peut y avoir d’apprentissage. La difficulté sert de boussole à l’apprenant. Une nouvelle connaissance encore incomprise, un manque de maîtrise technique apporte une certaine dose de difficulté. Si cette dernière disparaît ou tend à disparaître, l’apprentissage en fait de même.

L’apprenant ne doit plus voir la difficulté comme un frein, ni comme une frustration, mais comme un guide. S’il y a difficulté, il y a possibilité de progression : embrassez-la.

Tuez l’illusion de connaissance

Le premier obstacle auquel fait face l’apprenant est l’illusion de connaissance. Ce principe, mis en exergue par Daniel Kahneman, repose sur le fonctionnement automatique du cerveau humain.

Nous aimons naturellement la fluidité du mouvement, nous adorons les raisonnements simples, parfois incomplets, voire faux. Nous sommes prêts à accepter une situation et à nous mentir à nous-mêmes pour éviter les situations difficiles. Nous nous mentons quant à notre propre compétence.

Ce biais psychologique crée chez l’Homme est l’effet Dunning-Kruger, nous n’arrivons pas à évaluer notre propre compétence. Nous fuyons la difficulté et refusons volontairement toute mise à l’épreuve. Moins nous sommes compétents dans un domaine et plus nous sommes portés à surévaluer nos capacités.

Comment s’extirper de cette illusion ? Une mise à l’épreuve systématique de nos compétences sous-entend se mettre en quête de difficulté.

Se mettre à l’épreuve est un terme qui sied parfaitement. Éprouver son niveau est le fondement de la plus redoutable technique d’apprentissage, la récupération en mémoire.

La récupération en mémoire

Cette technique, identifiée par trois experts en sciences cognitives dans leur ouvrage « Mets-toi ça dans la tête », est la plus puissante technique d’apprentissage.

Notre cerveau commence par encoder les nouvelles informations reçues. Une nouvelle exposition à ces informations va le porter à les consolider : il les ancre plus profondément et améliore leur représentation mentale. La plupart des apprenants s’arrêtent là.

Pourtant, et c’est là qu’intervient la récupération. Lorsque l’on utilise ces informations, pour les récupérer en mémoire, tout en tentant de les sortir de notre tête pour les utiliser, nous projetons cette nouvelle connaissance et créons ainsi de nouvelles liaisons neuronales.

En appliquant et en récupérant la connaissance, nous développons au sens propre du terme, notre cerveau.

Selon les travaux du Dr. Agarwal, la récupération peut être utilisée à toutes les étapes de l’apprentissage :

  • Avant l’exposition à l’information pour préparer le terrain
  • Pendant la phase de compréhension pour accélérer la modélisation mentale de l’information
  • Durant la phase d’application pour renforcer notre mémorisation et notre capacité d’application de l’information dans un nouveau cadre, le transfert de connaissance.

Comment pouvons-nous appliquer la récupération mémorielle ? Nous allons voir les étapes pour monter en compétences et/ou pour apprendre une nouvelle connaissance.

1. Améliorer sa compréhension grâce à la récupération

Avant de commencer à apprendre et à retenir l’information, il faut d’abord la comprendre. Là encore la récupération en mémoire est redoutable. Habituellement, vous êtes exposé à une nouvelle information, dans une vidéo, un article ou encore un livre, que faites-vous ? Au pire, vous passez à autre chose, au mieux, vous prenez des notes. La récupération vous propose une alternative.

Lorsque vous passez devant une information que vous n’êtes pas certain d’avoir comprise, arrêtez-vous quelques instants, puis imaginez-vous expliquer ce que vous venez de voir à un proche. Si cet exercice vous semble difficile et que vous ne parvenez pas à expliquer les choses, c’est que vous n’avez pas réellement compris.

Relisez votre information et recommencez l’exercice jusqu’à y parvenir, ensuite, continuez à apprendre.

Cette technique dérivée de la méthode Feynman, vous permet d’instaurer la difficulté dès la phase d’apprentissage. En prenant le temps de tester votre compréhension, vous êtes certain de conceptualiser correctement l’information avant de passer à la prochaine étape, la pratique espacée.

2. Pratique espacée

Rappelez-vous le fonctionnement du cerveau décrit précédemment dans cet article. Le cerveau encode l’information, puis la consolide et enfin la récupère. Tout ce procédé demande un espacement temporel et plusieurs répétitions pour être efficace.

À chaque exposition et surtout à chaque récupération, le procédé se répète. Aussi, dès que ce procédé prend place, votre cerveau crée de nouvelles liaisons neuronales. À chaque répétition, vous renforcez votre conceptualisation de la connaissance.

La répétition espacée est essentielle à l’apprentissage. C’est le psychologue Hermann Ebbinghaus qui a mis en exergue l’oubli dans le temps à travers la courbe qui porte son nom.

Ainsi, lorsque vous apprenez une compétence, pensez à appliquer la récupération mais aussi à l’espacer dans le temps. Mieux vous maîtriserez votre sujet et plus vous pourrez espacer vos exercices dans le temps.

  • Commencez à vous tester sur des intervalles rapprochés, c’est-à-dire plusieurs fois par jour.
  • Lorsque chaque répétition devient facile, alors espacez à une fois par jour, une fois par semaine, une fois par mois, etc.

3. L’effet de génération

Dans l’apprentissage par la génération, vous tentez de résoudre un exercice avant d’avoir obtenu la connaissance nécessaire. Cela pourrait être une tentative de calcul du troisième côté d’un triangle rectangle avant d’apprendre le théorème de Pythagore.

Les hypothèses scientifiques derrière ce procédé reposent sur le principe de préparation à recevoir la connaissance.

En tentant de résoudre le problème, vous allez utiliser vos connaissances actuelles et les récupérer en mémoire : vous préparez leurs futures liaisons neuronales. La nouvelle connaissance créera de nouvelles liaisons plus facilement avec les anciennes.

Lorsque vous serez exposés à la réponse, votre cerveau sera comme « échauffé », vous comprendrez plus simplement et plus rapidement : vous améliorerez et accélèrerez votre modélisation de la connaissance.

Prenons l’exemple d’une formation en ligne sur l’informatique. Pour passer d’un exercice au suivant, vous devez d’abord résoudre un problème algorithmique. Or, si vous avez suivi le cursus, vous n’avez pas encore toutes les connaissances nécessaires à l’écriture d’un programme optimal. En résolvant des exercices d’algorithmie à notre manière, nous renforçons notre capacité à comprendre la logique derrière ce qui nous a posé problème, peu importe le résultat obtenu.

En consultant une correction par la suite, en tentant de la comprendre puis de la réappliquer, nous nous approprions une solution pour un problème donné. C’est de cette manière que nous développons notre capacité de transfert de la connaissance.

Si l’on imagine une matière “scolaire” que vous souhaitez travailler, vous avez plusieurs possibilités :

  1. Tenter d’expliquer le contenu du cours à venir
  2. Essayer de résoudre les QCM de fin de cours au début du cours
  3. Trouver les solutions des exercices avant d’être exposés à l’information.

4. La pratique délibérée et la pratique réflective

Dans « Mets-toi ça dans la tête », les auteurs nous parlent d’un chirurgien nommé Ebersold. Ce chirurgien prend le temps, tous les soirs, de décrire ses opérations du jour dans un carnet. Quel est l’intérêt ?

En décrivant ses opérations, il récupère l’information. En tentant d’identifier ce qui ne s’est pas passé convenablement ou ce qu’il aurait pu faire différemment, il consolide une nouvelle information réutilisable à l’avenir.

D’ailleurs, tous les grands sportifs s’exercent à la pratique délibérée, eux-mêmes et leurs entraîneurs visionnent les matchs passés et tentent d’identifier leurs lacunes. Ce travail de réflexion permet d’accélérer considérablement l’apprentissage. Pourquoi ?

L’expertise repose en une seule chose : la capacité à reconnaître des modèles, puis à tester ces modèles avec un retour d’information rapide. Car intégrer une pratique réflective dans vos exercices vous aide à identifier plus facilement vos lacunes. Vous identifiez vos modèles déficients et les améliorez !

Si l’on reprend le fonctionnement de la mémoire, en vous exerçant à agir ainsi, vous consolidez votre conceptualisation.

La rédaction d’articles professionnels est un parfait exemple de pratique réflective. Vous mêlez le gain de notoriété à un apprentissage plus plastique. De nombreux métiers sont historiquement liés à la publication tels que les avocats, juges, médecins, etc.

Publier un article sur l’exercice quotidien de votre métier vous invite à la réflexion. Lorsque vous publiez, vous affichez une pensée, elle est ancrée et n’importe qui pourra retrouver cette information.

Vous vous obligez donc à penser et à remettre en question votre activité dans un souci d’exactitude. En construisant le plan de votre article, vous imaginez une méthode de présentation de l’information et vous réorganisez mentalement votre activité. Vous la re-conceptualisez en créant ou en renforçant vos liaisons neuronales.

Pour appliquer une pratique réflective optimale, pensez à répondre à ces questions :

  • Que s’est-il passé ? Qu’est-ce que j’ai fait ?
  • Comment cela a fonctionné ? Comment pourrais-je faire différemment la prochaine fois ?
  • Qu’est-ce qui s’est bien passé ? Comment aurais-je pu l’améliorer ?
  • Que pourrais-je apprendre de plus pour faire mieux la prochaine fois ?
  • Quelles autres expériences cela me rappelle ? Quelle connaissance y est liée ?
  • Que pourrai-je apprendre pour une meilleure maîtrise ?

Obtenir les bons feedbacks

Dans chaque réflexion que vous allez mener se cachent des retours d’informations. Ces feedbacks sont au nombre de deux :

1. Les feedbacks qui indiquent votre compétence globale. Votre capacité à concevoir un site internet complet, votre capacité à tenir une conversation avec un natif d’une autre langue. Si cette mesure représente votre objectif final, cela n’en est pas moins une « vanity metric » (un indicateur trompeur). Elle n’indique pas d’axes d’amélioration. N’y accordez que peu d’importance.

2. Les feedbacks qui identifient ce qu’il ne va pas. Ce sont ces feedbacks qui nous intéressent. En décomposant votre pratique, vous pouvez mesurer plus aisément votre performance sur telle ou telle composante. Logique algorithmique, capacité à déployer un projet en direct, contrôle qualité, etc.

Les feedbacks sont essentiels pour identifier vos lacunes. Identifier les bons retours d’expérience vous permettra de faciliter votre réflexion. Suivez essentiellement les feedbacks vous aidant à mettre en œuvre une action. Sans cela, vous risquez de penser que tout va pour le mieux alors que ce n’est pas forcément le cas.

Décomposez votre pratique, mesurez votre performance et identifiez ce qu’il ne va pas. Détectez des axes d’améliorations, puis avancez dans votre pratique.

5. La pratique directe

La pratique directe est l’ultime forme de la récupération en mémoire. Cette forme d’exercice vous invite à utiliser votre savoir dans les conditions du réel.

Si vous apprenez pour un examen, alors exercez-vous comme si vous y étiez. Si vous apprenez le développement web ? Créez un véritable site web.

Pourquoi ? Car la pratique directe utilise toutes les pratiques précédemment citées. Lorsque vous êtes bloqué, vous devez réfléchir et trouver des solutions alternatives : c’est la pratique réflective.

Quand vous créez un projet, vous ferez tôt ou tard face à un savoir que vous ne maîtrisez pas, c’est l’effet de génération. Si votre projet vous demande plusieurs jours, voire plusieurs semaines ou plusieurs mois, vous espacerez naturellement vos pratiques.

Enfin, pour réussir votre projet, vous devrez avoir la compréhension de ce que vous faites : cela ne peut pas fonctionner autrement.

Le mot de la fin : développez votre maîtrise

Comme je l’ai dit plus haut, la clé de la maîtrise est l’identification de patterns exacts et surtout la limite de ces patterns. Toute connaissance a une limite.

La relativité et la physique quantique mettent des limites aux théories de Newton dans certains cadres.

Un bon cuisinier est capable de vous proposer tout type de plat classique, alors qu’un expert en cuisine maîtrise l’assortiment des ingrédients. Il peut jouer avec pour vous proposer des variations gustatives et visuelles, c’est un trait essentiel en haute gastronomie.

La maîtrise se cultive par la récupération en mémoire. La récupération renforce et établit des liens neuronaux. Ceux-ci permettront la modélisation de la connaissance.

En vous confrontant systématiquement à l’échec, la récupération en mémoire et ses différents modes d’exercice vous obligent à rectifier le tir. Vous êtes obligé de re-modéliser votre connaissance jusqu’à comprendre son champ d’application et ses limites. C’est ainsi que vous garderez une solide trace en mémoire de vos acquis.

Pour aller plus loin : Mets-toi ça dans la tête !: Les stratégies d’apprentissage à la lumière des sciences cognitives par Peter C. Brown.

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